slaves que
Premier contact avec la population.
Au cours de nos visites dans la ville de Zagreb, nous avons
eu mille occasions de parler avec des travailleurs et des ména-
gères sur leur travail et leurs conditions de vie; nous avons
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toujours rencontré chez nos interlocuteurs une grande peur
de parler, même dans les très simples conversations que nous
avons eues sur les difficultés de vie, de ravitaillement et de
travail. Un ouvrier nous parle des salaires; deux miliciens
s'approchent; l'ouvrier se sauve sans excuses, sans rien. Dans
le tram, un ménage nous raconte sa vie; lui gagne 3.000 dinars
par mois, elle ne travaille pas; ils ont approximativement 100
dinars, par jour pour faire vivre deux personnes. Le loyer
mensuel coûte 300 dinars, un kilo de pain noir coûte 7 dinars
(avec les tickets, ils ont le droit d'en acheter 650 grammes par
jour), un kilo de pommes de terre coûte 30 à 35 dinars, un
litre de bière 35 dinars, un euf de 16 à 20 dinars. Lui a droit
à un kilo de viande par mois, elle à 200 grammes. Avec ticket,
la viande coûte aux environs de 50 dinars le kilo; sans ticket,
de 2 à 300 dinars; le kilo de fruits, en général de mauvaise
qualité, varie entre 50 et 100 dinars le kilo. Jusqu'aux pommes
vertes, véreuses, ramassées sous l'arbre, que l'on vend à 30
dinars le kilo. Les produits laitiers sont libres : le beurre coûte
600 dinars le kilo, le fromage de 400 à 600 dinars le kilo. I
y a des titres de rationnement seulement pour le pain, la
graisse, la viande, le sucre et l'habillement - le chocolat, en
petite quantité pour les enfants. En dehors des quelques pro-
duits contingentés et taxés à un prix relativement abordable, le
reste : légumes, fruits et autres, sont libres et non taxés, à des
prix très élevés soit au marché où les paysans viennent appor-
ter leurs produits, soit dans les coopératives de consommation
où les prix sont sensiblement les mêmes. Les objets de pre-
mière nécessité : peignes, casseroles, assiettes, sont de mau-
vaise qualité et à des prix inabordables. Il y a des Magasins
d'Etat de luxe, où l'on vend soit des produits d'occasion dont
les ex-bourgeois se défont pour pouvoir vivre, soit des produits
de très bonne qualité : tissus de lin, gants fourrés, verreries,
meubles, que seuls les nouveaux riches peuvent se payer.
A partir du lundi matin, nous travaillons sur le chantier,
d'abord au terrassement, ensuite à porter des briques ou à faire
le mortier. Les constructions sont des plus rudimentaires, non
seulement comme conception, mais aussi comme exécution. Ce
sont des bâtiments en brique, hauts d'un étage, dans lesquels
pourront loger une cinquantaine d'étudiants. Sur le chantier,
nous discutons avec des étudiants et des ouvriers maçons. Ils
nous disent que les privilégiés du régime ne sont pas les
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techniciens qui ont des salaires plus élevés que les ouvriers
(en général 2 ou 3 fois), mais les bureaucrates de l'appareil
d'Etat : responsables syndicaux, administrateurs, responsables
du parti, du front populaire, de la J.P.Y., des organismes de
propagande, journalistes, artistes, les officiers de carrière de
l'armée et de la police. Nous avons aussi des précisions sur le