mais aussi pour les professionnels. Ainsi, le bilan de ces
actions, tout compte fait, n'est jamais négatif. Même en cas
d'insuccès, le découragement, le scepticisme et la ponction
financière retiendront bien de prendre part, à bref délai, à
d'autres actions, mais ces entraves s'effacent progressivement
à mesure que se clarifie l'idée qu'il faut que tous s'y met-
tent ».
C'est à travers des luttes de cette nature que se précise la
nécessité d'une action de classe, seule capable d'améliorer
réellement le sort des ouvriers. Les grévistes eux-mêmes
apprennent en effet : que le patronat n'est sensible qu'à la
violence ouvrière et ne discute que le couteau sous la gorge ;
qu'avec le patron on ne peut entretenir des rapports « ami.
caux », mais constamment et nécessairement hostiles, puisqu'il
bafoue les notions admises de justice et de bon droit ; qu'une
grève, pour réussir, doit entraîner la majorité et se présenter
dans des conditions favorables. Le succès d'une grève limitée
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apporte, si besoin est, cet enseignement aux non-grévistes ;
l'échec, générateur d'amertume et de découragement, met éga-
lement en évidence la nature de classe de l'exploitation. Dans
le premier cas, le ton général est de triomphe, dans l'autre,
nombreux sont ceux qui jurent qu'on ne les y prendra plus,
que les patrons sont les plus forts, qu'on a bien tort de risquer
son emploi pour des « salauds » qui n'ont pas débrayé, qu'on
n'aurait pas dû suivre, etc... toutes réactions imputables au
désarroi, à l'humiliation, à la gêne financière, mais qu'en
résulte-t-il par la suite ? Pour la majeure partie, après réflexion
et atténuation du choc subi, c'est la même volonté de résistance
et de lutte (dont les causes objectives demeurent) puisque
c'est la seule façon d'obtenir satisfaction.
ACTION COLLECTIVE ORGANISEE
Il n'y a pas à l'usine d'action collective spontanée à l'état
pur, bien entendu. La spontanéité caractérise de nombreux
mouvements à leur origine, mais il arrive toujours que les
syndicats viennent les contrôler, ou tout au moins, en le ten-
tant, les influencent. Les responsables syndicaux et délégués
du personnel se mettent en contact avec les ouvriers en lutte
et s'imposent comme intermédiaires entre eux et la direction.
Cette initiative n'est pas mal vue par les intéressés, parce
qu'elle représente pour eux l'appui d'organismes « puissants »
et les « relie » aux ouvriers qui sont restés en dehors du conflit.
Cette « aide >> morale et matérielle est un stimulant pour la
lutte, ce qui fait qu'à l'issue du mouvement, les ouvriers, en
appréciant cette solidarité, sont renforcés dans l'idée de la
nécessité d'une union réelle de tous les travailleurs.
Il arrive donc que les ouvriers amènent les syndicats sur
leur propre terrain, mais le plus souvent ce sont les syndicats
ou organisations politiques qui présentent leurs mots d'ordre
revendicatifs ou politiques. L'initiative de délégations à la
direction, pétitions, débrayages, leur revient à propos de reven-
dications de toute nature, aussi bien sur le salaire que sur des
éléments accessoires ; ces mots d'ordre sont valables pour une
équipe ou un atelier, ou bien pour toute l'usine. Dans le pre-