dresser les cahiers de revendications à présenter à la direction. Ces
cahiers se présentent finalement ainsi :
1° Augmentation horaire générale de 40 francs ;
2° Retour à la semaine de 40 heures, sans diminution du pou.
voir d'achat;
3° Diminution des cadences ;
41
comedy
.
4° Trois semaines de congés payés ;
5° Paiement de toutes les fêtes légales.
A Asnières même, il n'y a pas encore de débrayages spontanés,
mais aux chaînes de carrosserie, à Gennevilliers (Panhard, Ver-
sailles, Colorale, Juvaquatre, Peugeot, Autocars), où les gars ont
des revendications particulières, et où le travail est un bagne, l'agi-
tation est très grande. Les ouvriers parlent du succès de Saint-Nazaire.
Le Directeur général, flairant le vent, adresse le 14-9, une lettre à
chaque membre du personnel, mettant en relief :
1° Que malgré leur augmentation forte, les travailleurs de
Saint-Nazaire restent bien en-deça de ceux des usines Chausson
(toutes primes comprises, un manquvre gagne 190 frs de l'heure,
un P 2 de 260 à 310 frs, environ);
2° Que la direction suit une politique d'augmentation progres-
sive des salaires, et que pour le présent, rien ne peut être fait.
Cette lettre étrange a pour effet de renforcer le personnel
ouvrier dans l'idée que le patronat redoute un mouvement et par
conséquent, consentirait à « lâcher quelque chose », pourvu qu'on le
lui demande fermement.
Parallèlement, malgré le mutisme de la C.G.T. sur la question,
i) vient aux oreilles de tous qu'un accord vient d'être passé chez
Renault, dont on retient surtout les 4 %. d'augmentation et les
trois semaines de congés payés. C'est pourquoi, lorsque sous la pres-
sion certaine de la « base » à Gennevilliers, les syndicats C.G.T. pro-
posent un débrayage de 14 à 16 h., le jeudi 22 septembre, « un
groupe de travailleurs d’Asnières ayant écrit une proposition d'ac-
tion pour tout le groupe afin d'obliger la direction à discuter des
salaires, les sections C.G.T. des usines SUC... l'ont examinée atten-
tivement, l'ont retenue et approuvée », suivant un puissant de
brayage de la carrosserie le mardi 20, c'est un plein succès. Dési-
reuses de ne pas être dépassés, la C.F.T.C., de bonne grâce, et F.0.
en rechignant (« la C.G.T. n'a pas demandé l'avis des autres organi-
sations »), se joignent au débrayage. Dans la rue, se pressent quel-
ques trois à quatre mille ouvriers et quelques dizaines de mensuels
d'Asnières (débrayant à 90 %) et de Gennevilliers (100 %). Le
meeting est placé sous le signe de l'Union. Marrane de la C.G.T.,
y passe en vedette « américaine », tire les rieurs à lui et fait de l'es-
prit sur le dos du patron. L'ambiance est très chaleureuse, les mots
d'ordre, maintes fois repris, sont : nos 40 francs et Chausson peut
payer. Information y est donnée que la direction recevra les délé-
gués le lendemain matin. On rentre à l'atelier, convaincus que le
patron, ébranlé par la puissance du débrayage, lâchera le « quelque
chose ». Les plus optimistes vont jusqu'à 10 francs, quant aux trois
semaines, elles sont pour ainsi dire dans la poche. (On ne trouve
pas un gars qui croit aux « 40 francs »).